VILI / VIDD
Les lésions pulmonaires induites par la ventilation mécanique (VM) (Ventilator-Induced Lung Injury en anglais ou VILI) sont au cœur des stratégies de ventilation artificielle depuis de nombreuses années, encore plus avec le contexte actuel de la COVID-19.
À côté de ces VILI existe une autre entité qui se focalise sur le retentissement de cette même VM sur la fonction diaphragmatique. Elle se nomme VIDD pour Ventilator-Induced Diaphragmatic Dysfunction en anglais.
LPV / DPV
Cette notion n’est pas nouvelle, loin de là, mais son association aux VILI dans l’établissement de stratégies de ventilation pour les prévenir de manière conjointe l’est beaucoup plus. A tel point, qu’aujourd’hui, parler de Lung-Protective Ventilation (LPV) sans parler de Diaphragm-Protective Ventilation (DPV) pourrait presque constituer une erreur puisque la première poussée à son maximum pourrait clairement nuire à la seconde et rendre le sevrage de la ventilation mécanique encore plus difficile.
DEUX DYSFONCTIONS DIAPHRAGMATIQUES
La première s’intègre à la défaillance multivicérale motivant l’admission du patient en réanimation et résulte de l’atteinte intrinsèque musculaire. Elle est non seulement corrélée directement à la mortalité mais constitue également un facteur pronostic. Dans cette atteinte, d’autres agressions participent à cette dysfonction diaphragmatique telles que l’état de choc cardiogénique, l’acidose respiratoire, la chirurgie abdominale et la nécessité d’utilisation de drogues comme les curares ou les corticoïdes.
La seconde est celle qui nous intéresse dans ce post. La VM provoque une altération des propriétés contractiles du diaphragme par des changements histologiques et biochimiques :
- Atrophie des fibres musculaires
- Modification anatomo-pathologiques de ces fibres
- Lésions structurelles (interruption des myofibrilles, augmentation du nombre d’entités vasculaires et modifications mitochondriales).
La VM pourrait causer la VIDD par 4 mécanismes :
- Sur-assistance
La contraction diaphragmatique est soit abolie ou fortement diminuée par la VM. Cela a pour conséquence le développement rapide (dès la 6ème heure) d’une atrophie par une augmentation de la protéolyse couplée à une diminution de la synthèse protéique.
- Sous-assistance
La charge développée et s’appliquant au diaphragme est excessive (contractions concentriques) ce qui cause des lésions musculaires et une dysfonction contractile.
- Asynchronies patient-ventilateur
Ces asynchronies provoquent des contractions diaphragmatiques excentriques (alors que le diaphragme s’allonge). Elles sont alors responsables encore une fois de lésions structurelles, d’inflammation et donc du développement de la dysfonction.
- Atrophie longitudinale
Elle est associée à l’utilisation de niveaux de PEEP élevés. Lorsque qu’une PEEP importante est appliquée au parenchyme pulmonaire et que les volumes télé-expiratoires augmentent, le diaphragme se « raccourcit » en fin d’expiration par une diminution du nombre de sarcomères sur toute la longueur des fibres. Cette atrophie longitudinale lèse la relation tension/longueur des fibres diaphragmatiques ce qui fait que quand la PEEP sera réduite, la sur-distension ainsi créée altérera sa performance.
EN COMBIEN DE TEMPS ?
12 heures de VM entrainent une réduction de 15% des fibres musculaires diaphragmatiques.
Après 18-24 heures, cette réduction approche 30%.
De plus, la ventilation contrôlée comme la ventilation assistée (surtout lorsqu’elle est importante) entraine cette dysfonction diaphragmatique.
À SUIVRE
On l’aura compris, prendre en compte cette VIDD dans nos stratégies de ventilation mécanique semble essentiel.
Dans le prochain post, nous aborderons les raisons et les manières dont Lung-Protective Ventilation et Diaphragm-Protective Ventilation doivent être peuvent s’allier.
RÉFÉRENCES
- Evaluation et impact de la dysfonction diaphragmatique au cours du sevrage de la ventilation mécanique chez le patient adulte de réanimation. Thèse de doctorat. Dr Martin Dres
- Schepens, T. et al. Lung- and Diaphragm-protective Ventilation in ARDS. Anesthesiology 2019; 130:620-33.